2014. GUICHARD/FERRAT. CINÉ-MÉMOIRE. 1959/2014
Un singe en hiver 1959/2015.
Un titre de roman, puis un film, une pièce de théâtre et une aventure que personne n’a oubliée. En tout cas, pas la ville de Villerville en Normandie où s’est tourné le long-métrage en janvier 1962. Pas non plus Gabin qui tenait là son vrai retour, après des rôles de truands. Pas plus Belmondo qui sortait de chez Godard. Verneuil, lui, laissait Fernandel. Audiard prouvait qu’il n’était pas que ce petit cycliste aux dialogues grand public. Blondin quant à lui, devenait un écrivain reconnu et plus seulement un chroniqueur du Tour de France. Et puis aussi Pinoteau et Costa-Gavras, premier et second assistant réal’, qui deviendront à leur tour de colossaux cinéastes.
Un roman. Antoine Blondin a terminé le manuscrit de son singe en hiver en 1959. Il fut ensuite publié aux éditions de la Table Ronde, a reçu le Prix Interallié à l’automne de la même année. C’est une fiction puissante et délicate à la fois, truculente et fine. Le talent de Blondin fait de ce récit une histoire sensible et humaine où se rencontrent deux colosses pleins de trop de vie et qui pourtant, fragiles, sont égarés dans l’existence comme ces singes qui en Orient, désemparés par les grands froids, descendent jusqu’à la ville pour passer l’hiver…
Tournage. Il fut donc tourné en Normandie en pleine fin de guerre d’Algérie. Début du tournage, 4 janvier 1961. Gabin possédait une demeure à 10 kilomètres des lieux principaux de Villerville. Belmondo n’est jamais revenu sur place, sauf le 22 août 2014, avec son fils. C’est la seule fois où Gabin et Belmondo se sont rencontrés à l’écran. Moi, perso, je ne l’ai vu qu’à la télé, ce film culte. Il connut néanmoins un beau succès malgré l’ambiance fin de guerre.
Distribution. Jean Gabin : Albert Quentin, patron de l’hôtel « Stella ». Jean-Paul Belmondo : Gabriel Fouquet, le jeune homme. Suzanne Flon : Suzanne Quentin, la femme d’Albert. Noel Roquevert : « Landru », le patron du « Chic Parisien ». Paul Frankeur : M. Esnault, le patron du café. Paul Mercey : le marchand de poissons.
Scénario : F.Boyer, H. Verneuil, M. Audiard
Adaptation : d’après le roman Un Singe en Hiver d’Antoine Blondin
Dialogues : Michel Audiard
Premier assistant réalisateur : Claude Pinoteau
Deuxième assistant réalisateur Costa-Gavras
Directeur de la photographie : Louis Page
Durée : 99 minutes
Critique merveilleusement écrite par Gilles Boizet. Albert Quentin ne descendra plus le Yang-Tsé-Kiang une nuit sur deux. Il a commencé à sucer des bonbons, quelques temps après qu’il eut décidé de cesser de boire, et a dû, les premiers temps se cramponner à son bureau de la réception, surtout quand l’heure de l’apéritif ramenait les hommes au Stella, l’hôtel-restaurant qu’il tient avec Suzanne, sa femme.
A la suite d’un bombardement meurtrier, en 1944, sur la petite ville normande de Tigreville (Villerville pour la République), il a joué sa destinée dans un serment d’ivrogne : « Si on en sort, si un jour on rallume l’enseigne qu’est au-dessus de la porte… »
Lorsque dix ans plus tard, sa soif calmée, le café a périclité, les affaires de l’hôtel marchent plutôt bien. Gabriel Fouquet (arrive de la gare de Deauville). Il vient de Paris et s’installe à l’hôtel. Il est venu voir sa fille, en pension à Tigreville, qu’il veut ramener à Paris et, chaque soir, boit plus que mesure, noyant sa détresse d’avoir manqué son mariage et sa vie de père, d’avoir gâché irrémédiablement son destin.
Le couple d’hôteliers le prend en amitié et s’inquiète pour lui, jusqu’à ce moment où Albert, oubliant son fameux serment, prenne avec lui une cuite fameuse dont Tigreville se souviendra toujours…
Commémoration. Je me suis rendu à Villerville en août 2012 pour commémorer, comme il se doit, l’anniversaire de ce beau film. (50 ans). Un ouvrage existe d’ailleurs sur cette aventure.
A Villerville donc, on a célébré ce cinquantième anniversaire du tournage par diverses manifestations, projections, expositions, conférences… Le village était décoré avec les portraits des deux principaux acteurs. Les touristes et fans pouvaient faire le tour de la petite ville sur les différents points des séquences du film. Rue, gendarmerie, café, hôtel, bazar, plage…
Théâtre. Au début de l’année 2013, je me suis rendu au théâtre et à Paris pour ne pas rater cette nouvelle version. Eddy Mitchell chanteur et auteur de ses chansons, avait déjà joué au théâtre en 2008 dans « Le Temps des Cerises ». Fred Testot, humoriste et comédien connu pour son duo avec Omar dans le SAV des émissions d’Omar et Fred, sur Canal +, était là pour sa première apparition sur les planches.
Un Singe en Hiver a traversé les époques. Cela grâce à ses excellents dialogues, au charisme et à l’authenticité des deux rôles principaux qui évoluaient dans des scènes mythiques… La tâche était ardue de reprendre le flambeau après Jean-Paul Belmondo et Jean Gabin.
Eddy Mitchell joue le gérant peu chaleureux d’un petit hôtel. Il a arrêté de boire et nous fait subtilement sentir qu’il va craquer et rechuter. Sous leur toit, ils accueillent un étranger -Fred Testot- très porté sur la boisson.
Tout ceci est prétexte à un éloge de l’ivresse, de l’amour de l’alcool comme dans le film. Le rythme lent qui convenait dans les années 60 ennuie un peu maintenant. Les personnages sont interprétés de manière trop calme, posée, presque atone. Nous aurions aimé que nos acteurs et la mise en scène rendent encore plus folles et déjantées les nuits d’ivresse. Nous voulions mieux sentir l’alcool les emporter au fil des verres.
Hommage. Le 14 octobre 2013, un hommage a été rendu à Jean-Paul Belmondo lors de l’ouverture du cinquième Festival Lumière de Lyon avec la projection du film Un singe en, hiver. L’acteur, accompagné de son fils Paul, fut ovationné par près de cinq mille spectateurs ainsi que par des invités pour l’occasion comme Jean Rochefort, Pierre Richard, Jean-Pierre Marielle, Charles Gérard, Bertrand Tavernier…
Documentaire. Un superbe et précieux documentaire, nous dit-on : Belmondo par Belmondo sera diffusé début 2015 sur TF1.